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ESPE d'Aquitaine : formation à l'EMI au sein du master MEEF
Anne Lehmans, formatrice dans le master MEEF documentation, responsable de l'EMI dans le tronc commun à l'ESPE d'Aquitaine, mais aussi chercheuse en sciences de l'information et de la communication a accepté de répondre à nos questions sur la formation au domaine de l'éducation aux médias et à l'information (EMI) et le master MEEF proposé à l'ESPE d'Aquitaine.
En tant que formateur en documentation, quel regard avez-vous sur les dispositifs pédagogiques en EMI mis en place dans la formation du master MEEF ?
L'EMI : une éducation transversale à toutes les disciplines
En tant que formatrice en documentation, je pense que l'introduction de l'EMI dans les programmes, notamment ceux du collège, est un progrès et contraint les responsables des formations dans les ESPE, toutes disciplines (y compris et notamment CPE) et niveaux confondus, dans les masters MEEF, à la prendre en compte dans les contenus de formations. Cependant, son caractère transversal présente le risque de la dilution, risque d'autant plus grand qu'en passant de l'éducation aux médias, qui était centrée sur les mass médias, presse écrite, radio, télévision essentiellement, à l'éducation aux médias et à l'information, qui ajoute la question de l'information non médiatisée dans un processus éditorial (sur internet, les réseaux socio-numériques) ainsi que celle des données, l'objet de cette éducation s'est complexifié.
Une mise en œuvre essentielle mais complexe
La conscience de l'importance fondamentale de cette éducation pour la construction d'une culture de l'information chez des élèves autonomes et futurs citoyens est cependant partagée, les moyens de sa mise en œuvre le sont moins. Il me semble également qu'un glissement se produit souvent et une confusion entre EMI et numérique, d'une part, formation à des questions sociales, économiques, politiques (communicationnelles) et formation technique à des outils, d'autre part. L'EMI est souvent abordée sous l'angle des "risques", "dangers" du numérique, ce qui représente un biais majeur. Elle est parfois traitée de façon simpliste autour de thèmes récurrents (actuellement les théories du complot par exemple) au détriment de la complexité. On ne peut l'aborder sans s'interroger sur les pratiques et les représentations non scolaires des élèves et des enseignants. Pour les enseignants de toutes disciplines, la question n'est pas simple, parce que les contenus de cette éducation ne leur sont pas nécessairement familiers, en dehors de quelques bribes (en français, HG, SES, langues notamment), et qu'on n'est jamais à l'aise en formation avec des contenus que l'on maîtrise mal, des outils qui demandent des efforts supplémentaires de formation et complexes à utiliser sur le terrain, des dispositifs qui demandent du temps.
Quels sont les parcours du master MEEF les plus impactés par les problématiques de l'EMI ?
Les problématiques de l'EMI concernent tous les parcours. A l'ESPE d'Aquitaine, on a donc fait le choix de proposer une formation à l'EMI en "tronc commun". Elle ne touche malheureusement pas tous les stagiaires qui choisissent parmi 4 thématiques. Je pense qu'elle devrait être obligatoire pour tous. Nous organisons des conférences avec des spécialistes, qui sont enregistrées, diffusées sur le site de l'ESPE, et très consultées, pour tous les étudiants, et chaque année l'EMI est traitée. Cette année, la conférence d'Anne Cordier a connu un franc succès. Dans les parcours disciplinaires, c'est évidemment le parcours documentation qui est le plus concerné, puisque le professeur documentaliste est l'expert, le référent et le pilote de l'EMI dans les établissements. Les lettres, l'histoire-géographie, les langues, les SES, les CPE sont également très impliqués. Les disciplines scientifiques se sentent souvent moins concernées mais le sont pourtant. Dans le premier degré, la question ne se pose même pas, on fait de l'EMI dés la maternelle.
Quels sont, selon vous, les avantages à mettre en œuvre des projets EMI auprès des étudiants en master ?
L'EMI relève de notre responsabilité sociale, la question de savoir si elle doit être mise en oeuvre ou pas ne se pose pas. En dehors de cette responsabilité vis à vis de la jeunesse, l'EMI permet de travailler en projets, en transversalité, sur la complexité, sur des questions qui touchent la vie des élèves et qui les motivent souvent, avec des dispositifs qui font appel à leur réflexion et leur créativité. Les pédagogies actives (notamment Freinet) ont toujours fait de l'EMI, parce qu'elle ne peut pas relever d'enseignements transmissifs traditionnels mais d'apprentissages en faisant, en agissant par l'écriture, la communication, pour comprendre le monde dans lequel nous vivons. Les projets EMI permettent d'expérimenter toutes ces dimensions de la pédagogie et mobilisent tous les niveaux et disciplines. Enfin, elle permet d'aborder les questions vives, les controverses, et pour les futurs enseignants de traiter l'argumentation, l'évaluation de l'information, la critique, la confiance, la diversité des points de vue, les enjeux de la communication.
Vers quelles ressources peuvent se tourner les étudiants ou les formateurs intéressés par les thématiques de l'EMI ?
Le CLEMI, bien-sûr, et ses référents dans les académies, qui font le lien avec la presse. Des associations, mais il faut être sélectif. Des groupes de recherche ou professionnels comme le GRCDI et des revues comme Jeunes et médias, des travaux de chercheurs, y compris hors de France. Le programme de formation pour les enseignants de l'UNESCO. Il existe aussi plusieurs MOOCS EMI. Mais également, de très nombreuses ressources sur les sites institutionnels (via les TRAAM EMI) et CANOPÉ.
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